20 septembre – 27 octobre 2018
Date: 06/09/2018
Lieu d’exposition: Berardi Galleria d’Arte
Organisation: Galerie d’art Berardi
Événement: Cleto Luzzi (1884-1952). Un peintre romain à la cour du roi de Siam
Cleto Luzzi appartient à cette catégorie encore nombreuse d’artistes qui ont vécu entre les XIXe et XXe siècles tombés dans l’oubli et oubliés des critiques. Cette hypothèse apparaît à certains égards paradoxale si l’on considère que, au cours de sa carrière, Luzzi a non seulement réussi à gagner d’importantes commandes et récompenses mais, de 1929 à 1932, il a eu le privilège de devenir le peintre officiel du roi du Siam.
Formé en contact direct avec la culture académique de la fin du XIXe siècle, Luzzi a étudié à l’Institut des Beaux-Arts de Rome sous la direction de deux maîtres d’exception: Francesco Jacovacci et Giulio Aristide Sartorio.
Dès le début, il reçut une certaine indulgence pour le croquis, bien visible, par exemple, dans les peintures et aquarelles de «genre» juvéniles du XVIIIe siècle, plus affectueux et rococo. De Sartorio, cependant, il apprit les techniques nécessaires à la bonne exécution de l’art décoratif monumental, un secteur que Luzzi fréquenta souvent et avec un succès considérable.
Il se spécialisa bientôt dans la décoration des édifices religieux de la capitale, en 1914 il réalisa des fresques de l’église de San Nicola de ‘Prefetti en adoptant un classicisme correct mais pas très original. Avec la même approche, il crée ensuite de nombreux retables (par exemple à San Claudio, à San Giuseppe a Capo le Case, dans l’église de Santa Maria Margherita Alacoque, près de Sant’Eusebio et, encore une fois, dans la chapelle du Précieux Sang à Verano où en 1940, il peint la Via Crucis).
Un changement de registre évident apparaît au contraire dans les toiles exécutées à l’Est (Siam, Cambodge, Inde, Indochine, Birmanie). Une fois déplacé à Bangkok avec le poste de directeur de l’Académie royale des beaux-arts et de peintre de cour (1929), Luzzi semble s’ouvrir à l’expérimentation.
Le ton traditionaliste et oléographique des œuvres réalisées à la maison a cédé la place à un langage plus libre, construit sur des chromatismes raffinés et des coups de pinceau agiles rendus à la manière divisionniste.
Avec une approche parfois très personnelle, parfois stéréotypée sur les canons de l’orientalisme, Luzzi a peint des temples, des monuments locaux, des visions naturalistes fascinantes et même des «instantanés» exotiques de la vie quotidienne.
Si en Inde il n’a pas renoncé à dépeindre un charmeur de serpent occasionnel, au Cambodge il a été attiré par les ruines d’Angkor Wat et, avec lyrisme et sensibilité coloristique, il a créé une vue suggestive du complexe du temple au coucher du soleil. La lumière orientale a certainement joué un rôle crucial dans l’ouverture de Luzzi à un naturalisme plus intime et raffiné; cependant, les données formelles de la peinture d’Angkor Wat (1930) susmentionnée suggèrent à quel point l’artiste a dû déjà méditer sur la peinture de paysage à Rome, par exemple par Enrico Coleman et son professeur Sartorio. Bien que doué d’un talent considérable, Cleto Luzzi fut bientôt, injustement, oublié.
Après sa mort, une série d’expositions rétrospectives (organisées en 1956 au Palazzo delle Esposizioni à Rome et au Collegio Nazareno, en 1958 au Circolo di Forestieri de Sorrente) ne suffisent pas à maintenir le nom du peintre en vogue.
Manuel Barrese